DPE et fraude en 2025 : comment les erreurs et manipulations faussent le marché immobilier et les décisions de rénovation
Le Diagnostic
de Performance Énergétique est devenu un élément clé dans l’évaluation des
biens immobiliers, influençant directement leur valeur, leur attractivité sur
le marché et les décisions de rénovation énergétique. Avec la montée des
exigences réglementaires et les interdictions progressives de location des
passoires thermiques, le classement énergétique d’un logement peut déterminer
sa capacité à être vendu ou loué dans des conditions favorables. Pourtant, des
erreurs, des approximations et des manipulations existent, faussant la
perception réelle de la performance énergétique d’un bien et induisant en
erreur aussi bien les acheteurs que les syndics et copropriétaires d’immeubles
collectifs.
Certains
propriétaires peu scrupuleux cherchent à améliorer artificiellement la note DPE
de leur logement en minimisant volontairement certains critères. Une mauvaise
évaluation de l’épaisseur des isolants, une déclaration approximative du type
de chauffage ou une sous-estimation des déperditions thermiques peuvent faire
passer un logement classé F en E ou même en D. Cette manipulation permet
d’échapper aux restrictions imposées aux passoires thermiques et d’éviter
d’engager des travaux lourds avant une vente. Les acheteurs se retrouvent
ensuite face à un logement qui consomme bien plus que prévu, avec des factures
énergétiques élevées et parfois un inconfort thermique non anticipé. Le
classement affiché lors de la transaction ne reflète alors pas la réalité du
bâtiment, exposant l’acquéreur à des dépenses qu’il n’avait pas envisagées.
Dans certains
cas, les rénovations énergétiques réalisées pour améliorer la note DPE ne sont
pas adaptées au bâti existant. L’ajout d’une isolation intérieure sur des murs
en pierre ou en brique pleine peut perturber l’équilibre hygrothermique du
bâtiment, en bloquant la diffusion naturelle de l’humidité. Ce phénomène peut
entraîner l’apparition de moisissures, une sensation d’humidité permanente et
la détérioration des enduits intérieurs. Certains investisseurs profitent du
marché des passoires thermiques pour acheter des biens à bas prix, appliquer
une rénovation rapide et standardisée, puis les revendre avec une meilleure
note DPE, sans réellement améliorer la qualité thermique et sanitaire du
logement. Une isolation inadaptée, couplée à une absence de ventilation
performante, peut créer un environnement malsain et dégradé en quelques années.
Dans les
copropriétés, le DPE collectif joue un rôle crucial dans la planification des
travaux de rénovation et dans l’élaboration du plan pluriannuel de travaux. Une
mauvaise évaluation de la consommation énergétique globale peut influencer les
décisions prises en assemblée générale, retardant la mise en place des mesures
nécessaires pour améliorer la performance énergétique de l’immeuble. Un
classement trop optimiste peut dissuader les copropriétaires de voter des
rénovations essentielles, tandis qu’un classement trop sévère peut inciter à
des travaux mal ciblés ou inadaptés. Une mauvaise interprétation du DPE
collectif peut aussi compliquer l’accès aux financements pour la rénovation
énergétique, certaines banques conditionnant désormais leurs prêts à la
performance énergétique du bien financé.
Les erreurs
liées aux logiciels de calcul du DPE constituent une autre source de distorsion
du marché immobilier. Depuis la réforme du 1er juillet 2021, le DPE est devenu
opposable, mais il repose toujours sur des hypothèses et des modélisations qui
ne reflètent pas toujours fidèlement les performances réelles d’un logement.
Certains outils appliquent des valeurs par défaut lorsqu’un élément ne peut
être mesuré précisément sur site, ce qui peut entraîner des écarts
significatifs. Une pompe à chaleur mal renseignée, une isolation non prise en
compte correctement ou une exposition mal évaluée peuvent conduire à des
résultats incohérents. Un logement bien rénové peut ainsi se retrouver avec une
note inférieure à ce qu’il mérite, tandis qu’un logement mal isolé peut
bénéficier d’un classement plus favorable qu’il ne le devrait
Les
conséquences de ces erreurs et manipulations sont multiples. Pour un acheteur,
un DPE erroné peut signifier une dépense énergétique bien plus importante que
prévue et des travaux de correction à réaliser immédiatement après
l’acquisition. Pour un investisseur locatif, il peut s’agir d’un risque
financier, avec l’interdiction progressive de location des logements les moins
performants. Pour une copropriété, un mauvais diagnostic peut retarder ou
compromettre les décisions de rénovation, impactant la valorisation des
logements et les charges des résidents. Pour les banques et les organismes de
financement, des DPE mal établis faussent l’évaluation des risques liés aux
prêts immobiliers, renforçant l’incertitude sur la rentabilité des biens
financés.
Les acheteurs
doivent être particulièrement vigilants face aux risques de DPE erroné ou
manipulé. Une simple note affichée ne suffit pas pour juger la véritable
qualité énergétique d’un bien. Il est essentiel de demander des précisions sur
les éléments ayant servi à établir le diagnostic, de comparer les consommations
réelles des années précédentes lorsque c’est possible et, si nécessaire, de
faire appel à un expert indépendant pour confirmer l’évaluation énergétique du
logement. Une vigilance accrue est également nécessaire pour les copropriétés,
où le DPE collectif doit être étudié avec attention avant toute décision
d’achat ou de travaux. Les syndics doivent s’assurer que les diagnostics sont
réalisés avec rigueur, en tenant compte des caractéristiques réelles du bâti et
des équipements en place.
Le DPE est un
outil essentiel pour accompagner la transition énergétique du parc immobilier,
mais il reste imparfait tant que des erreurs, des approximations ou des fraudes
existent. L’avenir du diagnostic passera par un renforcement des contrôles sur
la qualité des évaluations, une meilleure prise en compte des spécificités des
bâtiments anciens et un recours plus fréquent aux audits énergétiques pour
compléter le DPE lorsque des doutes subsistent. Les propriétaires, acquéreurs
et copropriétaires doivent apprendre à ne pas se fier aveuglément à une simple
lettre affichée sur un rapport, mais à analyser en profondeur la réalité
énergétique du bien qu’ils convoitent pour éviter de mauvaises surprises.